Page 3 - -
P. 3

RÉFORMES NÉOLIBÉRALES ET


       ATTAQUES CONTRE LA SÉCU



       La Sécurité sociale est l’objet, dans le cadre de la transformation libérale de toute la Protection sociale, d’un
       travail de sape continu qui vise à son démantèlement.


       La Sécurité sociale et ses principes fondateurs (solidarité, universalité) sont
       remis en cause et la réforme de la PSC dans la Fonction publique participe
       de cette offensive.  Depuis 80 ans, le patronat et les gouvernements suc-
       cessifs s’attaquent avec constance au système de sécurité sociale au tra-
       vers de son mode de financement et de gestion. En 2007, Denis Kessler*
       a résumé l’ambition patronale qui perdure depuis la création de la sécurité
       sociale :  « il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodique-
       ment le programme du Conseil National de la Résistance ».
       La Sécurité sociale reste financée par des cotisations sociales dites sala-
       riales et patronales c’est-à-dire par une part socialisée de notre salaire.
       Mais des réformes successives ont sapé la Sécu en fiscalisant une partie
       de son financement, en particulier par la contribution sociale généralisée
       (CSG) dont le poids est grandissant.
                                    Le montant des exonérations et
                                    allègements de cotisations pa-
                                    tronales pour 2024 est d’environ
       80 milliards                 80 milliards d’euros. Le « trou de
       d’euros                      la Sécu » est le résultat d’un
       d’exonérations               choix politique délibéré. La Sécu                                               © Jeanne Menjoulet/flickr.com
                                    ne souffre pas d’un excès de dé-
       patronales.                  penses, comme le serine le dis-
                                    cours libéral, mais d’un manque
                                    de recettes.
       Depuis 1996 et la loi Juppé tant contestée, le parlement vote chaque année
       une LFSS (loi de financement de la Sécurité sociale) qui fixe l’Ondam (Ob-  logique d’individualisation et de privatisation. Cette évolution est profon-
       jectif national des dépenses d’assurance maladie) et permet de mettre sous   dément inégalitaire. Comme l’est le système à deux étages, assurance ma-
       tutelle de l’État le budget de la Sécurité sociale. L’objectif : battre en brèche   ladie obligatoire et assurance complémentaire, à l’inverse « de chacun
       la conception initiale de la Sécu selon laquelle la santé échappe à la logique   selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ».
       du marché. Il ne s’agit pas de tenir compte des besoins  sanitaires, mais de
       « maîtriser » les dépenses en limitant les prestations. L’austérité caractérise   * : vice-Président du MEDEF de 1998 à 2002 ; PDG de Scor (réassurance) de 2002 à 2021.
       les LFSS depuis de nombreuses années.
       Les dernières attaques contre la Sécu visent à accélérer les transferts de   Rupture des solidarités intergénérationnelles
       la prise en charge des dépenses des usagers vers l’assurantiel dans une
                                                                 Cette réforme de la PSC, qui touche les retraité·es actuel·les et futur·es,
                                                                 instaure une rupture des solidarités entre actifs, actives et retraité·es
       Assurance maladie complémentaire :                        puisqu’ils et elles n’ont pas droit à la participation de leur ancien
       un système inégalitaire                                   employeur. Les retraité·es devront choisir entre adhérer au contrat collectif
                                                                 en santé ou conserver un contrat individuel, dans les deux cas à des tarifs
          La réforme en cours complète de nombreuses dispositions qui depuis la fin   très élevés. Le montant de la cotisation des retraité·es augmente sur les six
          des années 1970 ont favorisé le développement des complémentaires et   premières années de la retraite jusqu’à 175 % de la cotisation d’équilibre.
          avec elles le recul des remboursements par la Sécurité sociale, la hausse du   La cotisation est aussi plafonnée à partir de 75 ans mais le tarif continuera
          prix de certains biens médicaux (lunettes, appareils auditifs...) et   de suivre l’augmentation de la cotisation d’équilibre déjà prévue chaque
          l’accroissement des dépassements d’honoraires. De sorte qu’il est devenu   année. Cette forte hausse est sans lien avec le montant de la pension.
          indispensable d’avoir une mutuelle pour ne pas renoncer aux soins et être   Les options facultatives seront à la charge totale des retraité·es. Ils et elles
          correctement remboursé·e.                              vont participer à financer leur propre fonds de solidarité à hauteur de 2 %
          Or, le système d’assurance maladie à deux étages est inégalitaire car la   de leur cotisation. Une option facultative en frais d’obsèques et perte
          couverture est meilleure lorsqu’on est en mesure de payer des cotisations   d’autonomie (relevant jusqu’à présent de la prévoyance) sera accessible
          élevées. Ce coût de la couverture peut être rédhibitoire : 4% de la   aux retraité·es avec la complémentaire santé.
          population ne dispose pas d’une complémentaire, ce taux est de 11,5% chez   Les retraité·es sont les grand·es perdant·es de cette réforme mais les offres
          les 10% les plus pauvres et 15% chez les personnes privées d’emploi. Les   sur le marché (en contrat individuel) risquent d’être plus chères en raison
          retraité·es ne sont que 4% à ne pas être couvert·es, mais leurs contrats sont   du départ des actifs et actives vers le contrat collectif obligatoire. Éclairer le
          plus onéreux et pèsent plus lourdement dans leurs revenus. Les différences   choix pour nos syndiqué·es retraité·es est un enjeu prioritaire.
          sont grandes aussi entre salarié·es, car la qualité de la couverture et le
          niveau de participation dépendent des capacités financières des
          entreprises, qui varient en fonction de leur taille et secteur d’activité. Enfin,
          le développement des contrats collectifs a entraîné de fait la
          marchandisation de la santé en  favorisant les sociétés d’assurance à but
          lucratif au détriment du monde mutualiste.







                PAGES SPÉCIALES DE                                      Protection sociale complémentaire ✦    3
                L’US #858
   1   2   3   4