Tous
les éléments des projets portés par l’ancien ministre Blanquer
sont repris et renforcés dans les annonces liées au « choc des
savoirs » : le scientisme, qui fait des « neurosciences » le
censeur des contenus et des dispositifs pédagogiques ; des
manuels scolaires « officiels » afin de formater les pratiques
pédagogiques ; le numérique et l’intelligence artificielle (IA)
comme leviers de dépossession du métier enseignant ; la
caporalisation des personnels ; l’orientation de plus en plus
précoce des élèves et une sélection, guidée par une « liberté de
choix » de « parcours individuels » conditionnés par le « mérite
» ; la dislocation des collectifs de travail par l’éclatement du
groupe classe.
Après l’ère
Blanquer où il a été oublié et malmené, le collège est piloté à
vue depuis deux ans : pas de texte officiel pour préparer la
rentrée sereinement ; des expérimentations menées dans tous les
sens (surtout dans une visée néolibérale) sans bilan puis
généralisées ; une communication incessante sans avoir rien
anticipé sur la faisabilité des annonces…
Sur le
terrain, la réalité malmène personnels et élèves. Des
effectifs qui débordent, une inclusion qui maltraite tout le
monde, des personnels qui courent après le temps, la perte de
sens du métier est grande. Exit l’heure de soutien et
approfondissement en 6ème, véritable usine à gaz dans
les collèges lorrains, voici donc les groupes de niveaux en
français et mathématiques. Outre le fait que la recherche, les
expérimentations déjà menées en décrient le principe, plusieurs
questions se posent : qui prendra en charge le niveau faible (15
élèves, c’est énorme) ? Quid de l’inclusion des EBEP dont les
difficultés se concentrent en général dans ces deux matières ?
Qui sera professeur·e principal·e si on écarte les collègues de
français et de mathématiques ? On imagine la désorganisation
pour des élèves de sixième qu’on accompagne à l’entrée au
collège mais également la pression sur les personnels de la part
des familles pour faire changer leur enfant de niveau. À cela
s’ajoute la difficulté, voire l’impossibilité, de confectionner
les emplois du temps.
La
liste des mesures qui organisent le tri social est
longue : possibilité de remplacer des enseignements (la LV2 par
exemple) pour ces élèves faibles par plus de français et de
mathématiques ; découverte des métiers dès la 5ème (en dehors de
toute considération sur le développement psychologique de
l’enfant) ; refonte des programmes sur 4 compétences (français,
maths, compétences psychosociales, culture générale), évaluation
standardisée chaque année… D’un côté une individualisation pas
seulement des parcours mais aussi des enseignements (on
n’apprendrait plus ensemble), de l’autre des injonctions aux
« bonnes pratiques » pour les enseignant·es. |